Lettre d’information MIAS LLN/Namur : Mémoires 21/22

Lors des sessions de juin et septembre 2022, différent.es étudiant.es ont terminé leur parcours en présentant un travail de mémoire dont les qualités ont été soulignées par les jurys.

Ces différents travaux sont présentés dans cette lettre d’information.

Nous vous en souhaitons une bonne lecture !

Et bien sûr, félicitations encore aux mémorant.es pour les travaux de recherche réalisés.

Si vous souhaitez davantage d’informations sur un de ces mémoires, vous pouvez prendre contact avec Thierry Dock






La prestation en ALE ou «travailler sans emploi», un permis de travail à sens multiple(s). Regards croisés sur le dispositif ALE
– par Isabelle CHAUVIER

Le dispositif des Agences Locales pour l’Emploi (ALE) permet aux personnes sans emploi qui y sont éligibles d’effectuer des prestations de services de proximité. Plutôt qu’une politique de l’offre, l’ASBL ALE propose une politique de réponses aux besoins locaux.

Ce travail ambitionne de mettre en perspective une possible évolution des ALE afin qu’elles rencontrent les attentes des personnes en demande d’emploi, et ce faisant, que le dispositif soit vecteur d’opportunités pour les allocataires qui s’y inscrivent.

La recherche repose sur une démarche méthodologique qualitative centrée sur deux niveaux : le point de vue in situ, local s’exprime notamment par la voix des travailleurs ALE au travers d’entretiens compréhensifs, alors que le point de vue global est principalement construit avec les acteurs ex situ.

L’analyse croisée des résultats isole les éléments marquants tels que le manque de reconnaissance, et montre que, au-delà de la finalité première du dispositif, d’autres finalités lui sont adjointes. Il est ici fait référence à l’insertion et à la cohésion sociale, mais aussi à l’insertion professionnelle. Le sens du travail VS emploi est abordé, et à sa suite, les compétences, et le statut. 

Le dispositif est ainsi situé dans un contexte sociétal local et global, et les attentes des travailleurs sans emploi sont révélées. La mise en évidence des enjeux et des potentialités offre dès lors des pistes à explorer.






Comment les mesures induites par la crise sanitaire s’inscrivent-elles dans les enjeux d’une organisation en pleine redéfinition ? Recherche dans une institution à la frontière entre Aide à la jeunesse et milieu carcéral
– par Thomas MAGNY et Marine TOUSSAINT

Notre recherche est née au départ d’un questionnement autour de l’impact de la crise sanitaire dans des milieux fermés. La quête du terrain a conduit notre binôme vers un lieu unique en Belgique avec la particularité de son hybridation entre deux univers qui semblent parfois difficilement conciliables : l’Aide à la jeunesse et le milieu carcéral.

Suite à la réalisation d’une dizaine d’entretiens avec des travailleurs « comme les autres », nous avons interrogé la manière dont s’inscrivent les mesures liées à la crise sanitaire dans les enjeux déjà présents au sein de l’organisation. Les lectures de Mintzberg, Goffman et Foucault ont éclairé l’orientation bureaucratique et verticale qu’a prise le centre pour répondre aux enjeux législatifs et humains qu’il connaissait. Nous avons ensuite plongé un peu plus loin dans ce « sous-marin » en interrogeant l’incorporation du milieu et de ses normes chez l’équipage. C’est d’ailleurs cette question de l’équipe et des relations entre ses « membres » qui nous a occupées dans la dernière partie de notre analyse.

Enfin, nous avons souhaité prendre un peu de hauteur et penser notre rapport aux deux postures que nous sommes amenés à endosser. D’une part, réfléchir sur la manière dont le cadre peut se saisir de l’analyse de terrain et d’autre part, mettre en avant ce que la position de chercheurs sur ce terrain spécifique nous apprend du terrain, de la recherche et de nous-mêmes. 






Quelles sont les ressources mobilisées par une association porteuse d’innovation sociale pour intégrer le travail soutenable ?
– par Laurie VANBIERVLIET

Ce travail s’inscrit dans une recherche plus vaste, portée par le CeRSO-CeREF à laquelle participe le CÉRIAS. Cette recherche vise à analyser dans quelle mesure les dynamiques d’innovations intègrent le travail soutenable. Ce qui nous amène à étudier l’innovation sociale sur deux plans différents.

Un plan individuel qui cible les travailleurs au sein de l’organisation. Ils ont un parcours de vie qui leur est propre. Ce plan analyse l’engagement et l’autonomie de ceux-ci via des entretiens semi-directifs et des discussions informelles. 

Un plan organisationnel qui cible une structure socialement organisée autour d’un projet innovant. Cette approche touche l’institutionnalisation du travail autant à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’organisation via des observations participantes, mais également à travers l’analyse de documents provenant de l’association tels que les rapports d’activités et des articles de presse sur l’ASBL.

Cette étude de cas met en évidence l’importance du sens de l’action, la concordance entre l’autonomie individuelle et la latitude décisionnelle ainsi que des tensions induites par la différence d’institutionnalisation interne et externe.






Les enjeux de la place des femmes dans le secteur à profit social : regard sur les structures représentatives des employeurs
– par Chloé LEMAIRE

Aujourd’hui, la question de la place des femmes est une question largement répandue dans de nombreux domaines. En effet, notre société s’interroge depuis plusieurs années sur la place de la femme dans différents milieux, tant professionnels que privés. Toutefois, certains secteurs restent peu développés en matière d’égalité des sexes. Ce mémoire a donc la volonté d’étudier cette question au sein du secteur à profit social. Particulièrement, il s’intéresse aux structures spécifiques, que sont les organisations patronales, dont la mission est de défendre les employeurs ainsi que l’ensemble d’un secteur d’activité. Au travers des concepts de négociation, stéréotype et plafond de verre et d’une étude qualitative (entretiens exploratoires, observations directes et entretiens semi-directifs), cette recherche propose une analyse sur les enjeux de la place des femmes dans les organisations patronales non marchandes. L’objectif est alors d’identifier les freins et les leviers des femmes travaillant dans ce type de structure pour, en finalité, proposer des pistes d’action permettant de valoriser la place des femmes dans le secteur à profit social.






Quand un engagement et une collaboration professionnalisent. L’expérience d’étudiantes assistantes sociales dans une co-intervention avec des étudiantes sages-femmes au service de futures mères en situation de précarité et d’exil
– par Gwenaëlle COUTEAUX

Dans ce mémoire est analysé un dispositif académique proposé à des étudiantes, sur base volontaire, en plus de leur cursus classique. Dans ce projet, des binômes d’étudiantes assistante-sociale et sage-femme sont amenés à aller à la rencontre de futures mères en situation de précarité et d’exil et leur proposer un accompagnement « domiciliaire » de plusieurs mois. D’abord, dans ce travail, nous interrogeons : comment ce projet « hors cadre » institutionnel professionnalise des étudiantes assistantes sociales ? Les données ont été récoltés lors de dix entretiens et six moments d’observation participante. Nous pointons grâce à notre analyse différents éléments qui semblent participer à leur professionnalisation: l’expérience pratique, l’engagement, la collaboration, l’incertitude et la réflexivité. Ensuite, nous nous basons sur cette analyse pour proposer différentes pistes de duplication du projet et des prolongements à notre recherche. Nous clôturons ce mémoire en proposant une analyse de la situation d’enquête, entre rupture épistémologique et familiarité avec les personnes interrogées.






Comprendre l’engagement des membres de collectifs de sensibilisation à l’environnement et les raisons de tenir face aux difficultés à susciter l’adhésion d’un public moins convaincu par les causes environnementales
– par Silvie PHILIPPART DE FOY

Face au dérèglement climatique et à ses conséquences désastreuses, le mouvement de lutte pour le climat a pris ces dernières années en Belgique une ampleur importante. Malgré les discours sur la volonté d’inclusion et de justice sociale défendus par les membres des collectifs de sensibilisation à l’environnement, un des constats mis en évidence est que le public qui le compose reste très homogène et peu représentatif de la diversité de la société. Les personnes appartenant à des franges fragilisées, précaires ou minoritaires sont souvent absentes des actions menées par ces collectifs.

Pour comprendre l’engagement des membres des collectifs de sensibilisation à l’environnement et les raisons de tenir face aux difficultés à toucher un public peu convaincu par les causes environnementales, trois terrains ont été explorés au moyen d’entretiens semi-directifs et d’observations participantes : deux collectifs bénévoles (une initiative de transition et un Écocentre) et un réseau intersyndical de sensibilisation à l’environnement dans lequel travaillent des salariés.

Trois thématiques ont été développées :  

  1. Comment ces collectifs composent-ils avec des publics qu’ils parviennent difficilement à toucher ?
  2. Comment ces collectifs s’organisent-ils dans l’action ?
  3. Quelle est la raison d’être de l’engagement des membres de ces collectifs ?





Les conditions de possibilité de l’engagement bénévole auprès de personnes d’origine étrangère et leur influence sur ses modalités
– par Inès VANDERLINDEN

Ce mémoire questionne les conditions de possibilité de l’engagement bénévole auprès de personnes d’origine étrangère ainsi que l’influence de ces conditions sur les modalités de mise à l’engagement. Cette problématique, directement issue des entretiens réalisés en Belgique et à Ottawa nous amène à explorer divers concepts, théories et contextes à travers trois niveaux d’analyse : micro, macro et méso.

Ainsi, il apparait que l’engagement bénévole ne se lit pas uniquement à travers la trajectoire biographique du.de la bénévole mais est également fonction des conditions de possibilité en présence. Celles-ci sont non seulement propres à l’individu.e mais également au contexte étatique, idéologique et organisationnel dans lequel l’engagement s’inscrit. L’enjeu est alors de rendre compte de l’enchevêtrement de tous ces facteurs au sein même de l’engagement bénévole.

Ce rapport explore des théories et concepts tels que le maintien de la trajectoire, la théorie de l’engagement processuel de Douglas (1990) associée à celle du don de Godbout (1994), les répertoires de valeurs, les fonctions du bénévolat, la valorisation sociale ou encore la théorie de la reconnaissance. Ceci est toujours en lien avec l’engagement bénévole auprès de personnes d’origine étrangère et basé sur les données empiriques récoltées.






La place de la relation à l’usager dans le travail des auxiliaires professionnels en CPAS : reconnaitre le travail vivant
– par Muriel PARE

La recherche qualitative interroge « ce que travailler veut dire » pour les auxiliaires professionnels en CPAS, à savoir les travailleurs sans titre de qualification requis en contact avec des usagers, bénéficiaires ou résidents dans ces institutions publiques à but social. Il s’agit de cerner « ce qui lie les personnes au travail, avant même de s’interroger sur les questions de compétence, motivation ou comportement au travail » (Thévenet, 2007).

La recherche prend appui sur le concept de « sale boulot » de l’école de Chicago et utilise le modèle des « cités » de Boltanski et Thévenot comme prisme d’analyse des communautés de sens et d’appartenance de ces travailleurs. Les résultats de l’analyse mettent en évidence les tensions entre « travail prescrit » et « travail réel » (Dejours, 2013), notamment au niveau des aspects émotionnels et affectifs, invisibles du travail prescrit alors que centraux au niveau de la représentation par les travailleurs eux-mêmes.

Enfin, l’analyse met en avant la dimension centrale de la « dignité ». Celle-ci permet de dépasser les pressions sociales et morales qui encadrent le métier. Elle représente la valeur sociale du travail : « la fierté de travailler ». Mais elle est avant tout l’élément central de la relation avec les bénéficiaires, collègues et chefs, faisant du respect un principe essentiel dans l’échange.






L’entrepreneuriat social, une spécificité de l’entrepreneuriat féminin ? Analyse de parcours d’entrepreneures à la frontière entre secteur marchand et non marchand
– par Stéphanie BARREIROS CORREIA

La littérature révèle que l’entrepreneuriat social est un concept fluctuant, car il est défini différemment selon le contexte socioculturel et économique de celui qui l’étudie. Ce mémoire propose une analyse de parcours d’entrepreneures ayant créé leur entreprise dans le secteur marchand et non marchand et met en avant comment l’entrepreneuriat social brouille les frontières entre le secteur social et commercial. Il apparaît dans cette étude que les motivations des femmes à entreprendre sont à analyser sous un angle systémique, car elles dépendent d’une multitude de facteurs et d’une articulation entre leur sphère professionnelle et familiale. Une analyse réflexive est également portée sur les dynamiques entrepreneuriales dans le secteur non marchand, en prêtant une attention particulière à la posture de cadre.






La participation citoyenne des personnes âgées: enjeu sociétal ou utopie?
– par Luka THAÏR

Face à l’augmentation générale du nombre de personnes âgées dans nos sociétés, il devient courant d’observer une certaine médicalisation du vieillissement, où de plus en plus de choses sont mises en place pour pallier les risques physiques et les menaces existentielles inhérents au processus de vieillissement. En parallèle, les politiques et pouvoirs publics orientent leurs actions vers le maintien à domicile. Ce dernier implique la mise en place de soins de base et d’aide à domicile, à la suite du passage d’une coordination de soins et d’aide à domicile qui, après avoir évalué les besoins de la personne âgée, sollicite les différents professionnels qui assureront ce maintien à domicile. Dans ce contexte de perte d’autonomie et de pouvoir, il convient de se demander comment renforcer la participation des personnes âgées en perte d’autonomie, par la coordination des soins et de l’aide à domicile ? Cette recherche s’est donc développée autour de cette notion de participation, qui sera travaillée selon trois concepts distincts : l’autonomie, le développement du pouvoir d’agir et l’empowerment.






Un projet à visée émancipatrice ? Analyse d’une recherche-action en quartier populaire
– par Shehrazade BELHALOUMI

Ce mémoire repose sur une recherche-action qui s’est inscrite dans le cadre d’une action collective, menée avec sept jeunes femme d’un quartier populaire de Bruxelles. L’intérêt de ces femmes à développer leur pouvoir d’agir les a menées à se constituer en collectif dans une visée émancipatrice. Ce travail s’attarde sur la manière dont les filles ont pris comme point d’ancrage un diagnostic partagé pour se mobiliser en vue de se réapproprier leur vécu et leurs expériences. L’action s’est matérialisée sous la forme d’un court-métrage, Medusa, réalisé avec, pour et par ces jeunes femmes. Cette recherche évoque la façon dont le groupe s’est approprié la théorie de l’intersectionnalité sur fond d’empowerment, tout en essayant d’imbriquer son expertise expérientielle. Se heurtant à des sous-identités inattendues, l’expérience de ce projet invite à la réflexion quant aux pratiques réflexives du travail social, avec un public féminin qui se situe à l’intersection de divers marqueurs sociaux.






La pluridisciplinarité au sein d’un projet housing first : la question de l’articulation des fonctions d’assistant social, de travailleur social et d’infirmier au sein de l’équipe logement de l’ASBL Arborescence
– par Anne-Charlotte LHUIRE

Ce mémoire porte sur la manière dont la pluridisciplinarité se manifeste au sein de l’équipe logement de l’ASBL Arborescence – spécialisée infirmiers de rue. Au travers de l’observation de réunions d’équipe et d’entretiens semi-directifs menés avec une partie des travailleurs ainsi qu’avec le médecin-coordinateur et la fondatrice de l’ASBL, l’idée a été d’explorer la répartition des rôles entre les fonctions, celle-ci apparaissant comme un facteur clé de la collaboration pluridisciplinaire.

Centrée sur les fonctions d’assistant social, de travailleur social et d’infirmer, telles que définies dans l’institution, l’analyse a révélé un flou quant à la répartition des rôles au sein de l’équipe, dans laquelle les travailleurs sociaux apparaissent comme les « parents pauvres », peinant à faire reconnaître leur spécificité par rapport à leurs collègues. La sociologie des professions et la théorie des champs sont alors venues éclairer ces enjeux de hiérarchisation et de reconnaissance, en soulevant des questions quant à la place du médical dans l’identité de l’ASBL aujourd’hui.






Le numérique, enfer ou Eden relationnel de la jeunesse ?
– par Melvin VERHOEVEN

Dans ce mémoire nous nous intéressons à la question de l’usage du numérique chez les jeunes afin de comprendre comment celui-ci pourrait influencer la construction et le maintien du lien social. A cette fin, nous nous intéressons à la construction des liens sociaux dans le « monde réel » mais aussi au sein de l’espace virtuel, grâce à la « sociabilité numérique ». Pour se faire, nous mobilisons la théorie de M. Granovetter portant sur les « liens forts » et les « liens faibles » mais aussi le concept de « système médiateur » de M. Bolle de Bal, l’intérêt étant, in fine, de comprendre en quoi ce « nouveau » phénomène social peut concerner les politiques de la jeunesse et les cadres du non-marchand.

Pour nourrir notre recherche, nous utilisons deux méthodes de recueil de données : l’enquête par questionnaire et le récit de vie. Le croisement des ces méthodes a permis : de dégager une pratique globale du numérique chez les jeunes, d’identifier plusieurs profils génériques mais non exhaustifs de jeunes et de nous focaliser plus particulièrement sur la question de l’isolement social en lien avec le numérique.

Sur ces bases nous analysons les enjeux et la pertinence de se saisir de cette thématique pour les « acteurs » des politiques de la jeunesse avant de clore la recherche par des pistes d’action et de réflexion à destination de ces mêmes acteurs.